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guerre, et c'est avant tout avec les jambes des soldats qu'ont été
remportées les victoires.
Son génie, c'est un extraordinaire sens du terrain, sur les
grands comme sur les petits espaces, une capacité à pressentir la
logique de l'adversaire, un dynamisme impérieux qui entraîne les
hommes (en trois jours, du 13 au 16 janvier 1797, la division
Masséna fait cent kilomètres à pied et participe à trois combats
victorieux), un sens de la manœuvre qui s'impose à l'ennemi et
l'amène à subir le lieu et les conditions du combat. Mais
l'Empereur ne laisse aucune initiative à ses subordonnés et son génie
est celui d'un homme seul. Ses ennemis s'en souviendront le moment
venu.
L'ascension. C'est fondamentalement par rapport à l'Angleterre
que se construit une politique extérieure qui peu à peu dévient
européenne et par là démesurée. Côté anglais, il s'agit de garder lа
maîtrise des mers et aussi un marché européen sans lequel l'économie
étouffe. Côté français, il faut, par l'arme économique ou militaire,
imposer l'autonomie du système continental et le libérer du joug
anglais, et, pour y parvenir, Napoléon dut bouleverser l'ancien régime
européen.
A trois reprises, les puissances continentales, poussées par
l'Angleterre, subissent la victoire française. En 1805, l'Autriche est la
grande vaincue; en 1806 et 1807, la Prusse et aussi la Russie; en
1809, à nouveau l'Autriche. Au-delà des victoires éclatantes –
Austerlitz, 2 décembre 1805; Iéna, 14 octobre 1806; Wagram, 6 juillet
1809... – , une réorganisation de l'Europe se fait au profit de Napoléon
et des membres de sa famille, dans la perspective d'une fermeture
du continent à l'Angleterre. En Allemagne, Westphalie, Saxe,
Hanovre croissent au détriment
de la Prusse et de l'Autriche.
Napoléon devient roi d'Italie, annexe les États pontificaux et
vassalise le royaume de Naples. Son frère devient roi d'Espagne. Un
grand-duché de Varsovie se crée en Pologne. Les provinces
illyriennes sont rattachées à la France, et l'Empire, avec 130
départements, s'étend en plus du territoire national sur la Belgique, la
Rhénanie, la Hollande et jusqu'à Rome au sud et Hambourg au
nord. Alliances et politique matrimoniales se joignent à l'action
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militaire: en 1807 et 1808, à Tilsit et Erfurt, Napoléon amène le tsar
Alexandre I
er
à fermer ses côtes à l'Angleterre; en 1810, il épouse Marie-
Louise, fille de l'empereur d'Autriche, et entre ainsi dans le concert
des familles régnantes européennes.
Zénith apparent de cette trajectoire, les années 1810–1811
dissimulent encore les deux difficultés qui pourtant annoncent le déclin.
Dès 1805, l'Angleterre avait écrasé la flotte française à Trafalgar et
ruiné tout projet de débarquement. Le combat ne pouvant plus être
qu'économique, Napoléon, par les décrets de Berlin (novembre 1806)
et de Milan (décembre 1807), fermait les côtes européennes aux
marchandises anglaises. Mais encore fallait-il que ce «Blocus continen-
tal» fût réel. Et c'est en particulier pour l'imposer en Espagne que
l'Empereur s'enfonce dans une guérilla où il commence à user ses
forces.
Le déclin. Avec l'Angleterre, c'est donc la guerre d'usure, et
l’année 1811-1812 la vit chanceler. Mais Napoléon, inquiet de
l’incertaine alliance du tsar, voulut ramener celui-ci dans son camp par
la force. Et c'est la campagne de Russie, prévue comme une guerre éclair
et qui tourne à la tragédie dans l'hiver 1812: des 675 000 hommes qui
passent le Niémen en juin 1812, 18 000 reviennent (d'autres suivront
plus tard) en décembre. Après la Russie, ce sont l'Allemagne, la
Hollande, l'Italie, l'Espagne qui sont perdues en 1813. La campagne de
France (1814) voit bien renaître le génie militaire du général de l'armée
d'Italie, mais la trahison des corps constitués l'emporte. L'Empire est
balayé; Napoléon abdique le 6 avril 1814 et part pour l'île d'Elbe.
En deux ans, le rêve s'est donc effondré: il renaît pourtant. De
l'île d'Elbe, Napoléon voit s'installer une première Restauration des
Bourbons qui fait revivre les souvenirs révolutionnaires et l’hostilité
à l'Ancien Régime. Il tente à nouveau sa chance: «le vol de l'aigle» le
ramène à Paris le 1
er
mars 1815, mais là, au lieu d’accepter l'aide
populaire et de se fonder sur l'esprit de l'an II, il prend appui sur un
très libéral «Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire» et sur une
classe de notables qui ne lui fait pas confiance. Comme les Alliés ont
décidé sa perte, il prend donc les armes et, dans un ultime duel avec les
Anglais, perd définitivement la partie à Waterloo le 18 juin 1815.
guerre, et c'est avant tout avec les jambes des soldats qu'ont été militaire: en 1807 et 1808, à Tilsit et Erfurt, Napoléon amène le tsar remportées les victoires. Alexandre Ier à fermer ses côtes à l'Angleterre; en 1810, il épouse Marie- Son génie, c'est un extraordinaire sens du terrain, sur les Louise, fille de l'empereur d'Autriche, et entre ainsi dans le concert grands comme sur les petits espaces, une capacité à pressentir la des familles régnantes européennes. logique de l'adversaire, un dynamisme impérieux qui entraîne les Zénith apparent de cette trajectoire, les années 1810–1811 hommes (en trois jours, du 13 au 16 janvier 1797, la division dissimulent encore les deux difficultés qui pourtant annoncent le déclin. Masséna fait cent kilomètres à pied et participe à trois combats Dès 1805, l'Angleterre avait écrasé la flotte française à Trafalgar et victorieux), un sens de la manœuvre qui s'impose à l'ennemi et ruiné tout projet de débarquement. Le combat ne pouvant plus être l'amène à subir le lieu et les conditions du combat. Mais qu'économique, Napoléon, par les décrets de Berlin (novembre 1806) l'Empereur ne laisse aucune initiative à ses subordonnés et son génie et de Milan (décembre 1807), fermait les côtes européennes aux est celui d'un homme seul. Ses ennemis s'en souviendront le moment marchandises anglaises. Mais encore fallait-il que ce «Blocus continen- venu. tal» fût réel. Et c'est en particulier pour l'imposer en Espagne que l'Empereur s'enfonce dans une guérilla où il commence à user ses L'ascension. C'est fondamentalement par rapport à l'Angleterre forces. que se construit une politique extérieure qui peu à peu dévient européenne et par là démesurée. Côté anglais, il s'agit de garder lа Le déclin. Avec l'Angleterre, c'est donc la guerre d'usure, et maîtrise des mers et aussi un marché européen sans lequel l'économie l’année 1811-1812 la vit chanceler. Mais Napoléon, inquiet de étouffe. Côté français, il faut, par l'arme économique ou militaire, l’incertaine alliance du tsar, voulut ramener celui-ci dans son camp par imposer l'autonomie du système continental et le libérer du joug la force. Et c'est la campagne de Russie, prévue comme une guerre éclair anglais, et, pour y parvenir, Napoléon dut bouleverser l'ancien régime et qui tourne à la tragédie dans l'hiver 1812: des 675 000 hommes qui européen. passent le Niémen en juin 1812, 18 000 reviennent (d'autres suivront A trois reprises, les puissances continentales, poussées par plus tard) en décembre. Après la Russie, ce sont l'Allemagne, la l'Angleterre, subissent la victoire française. En 1805, l'Autriche est la Hollande, l'Italie, l'Espagne qui sont perdues en 1813. La campagne de grande vaincue; en 1806 et 1807, la Prusse et aussi la Russie; en France (1814) voit bien renaître le génie militaire du général de l'armée 1809, à nouveau l'Autriche. Au-delà des victoires éclatantes – d'Italie, mais la trahison des corps constitués l'emporte. L'Empire est Austerlitz, 2 décembre 1805; Iéna, 14 octobre 1806; Wagram, 6 juillet balayé; Napoléon abdique le 6 avril 1814 et part pour l'île d'Elbe. 1809... – , une réorganisation de l'Europe se fait au profit de Napoléon En deux ans, le rêve s'est donc effondré: il renaît pourtant. De et des membres de sa famille, dans la perspective d'une fermeture l'île d'Elbe, Napoléon voit s'installer une première Restauration des du continent à l'Angleterre. En Allemagne, Westphalie, Saxe, Bourbons qui fait revivre les souvenirs révolutionnaires et l’hostilité Hanovre croissent au détriment de la Prusse et de l'Autriche. à l'Ancien Régime. Il tente à nouveau sa chance: «le vol de l'aigle» le Napoléon devient roi d'Italie, annexe les États pontificaux et ramène à Paris le 1er mars 1815, mais là, au lieu d’accepter l'aide vassalise le royaume de Naples. Son frère devient roi d'Espagne. Un populaire et de se fonder sur l'esprit de l'an II, il prend appui sur un grand-duché de Varsovie se crée en Pologne. Les provinces très libéral «Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire» et sur une illyriennes sont rattachées à la France, et l'Empire, avec 130 classe de notables qui ne lui fait pas confiance. Comme les Alliés ont départements, s'étend en plus du territoire national sur la Belgique, la décidé sa perte, il prend donc les armes et, dans un ultime duel avec les Rhénanie, la Hollande et jusqu'à Rome au sud et Hambourg au Anglais, perd définitivement la partie à Waterloo le 18 juin 1815. nord. Alliances et politique matrimoniales se joignent à l'action 17 18
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