ВУЗ:
Составители:
Рубрика:
79
qu’il est aujourd’hui hors de question de budgétiser moins de 5 millions une
dramatique de quatre-vingt-dix minutes.
Bref, le contexte est porteur et si la création n’est pas encore revenue au
tout premier plan comme à l’époque de l’ORTF, le temps du mépris de la
qualité immédiatement consécutif à la privatisation de la première chaîne
semble désormais passé. Bien sûr, Classe mannequin ou Navarro continuent à
caracoler aux premières places des sondages et n’ont toujours pas grand-chose à
voir avec les œuvres audiovisuelles de quelque intérêt qui forment l’ossature de
ce volume. Mais il y a maintenant quelque chose à côté et de plus en plus de
jeunes cinéastes créent indifféremment pour un média ou un autre. Nous avons
déjà évoque Philippe Faucon mais aurions pu également suivre la carrière de
Chantal Picault qui, venue du cinéma où elle avait réalisé un premier long
métrage sans retenir vraiment l’attention (Accroche-cœur, 1987), poursuit
depuis 1992 son travail à la télévision après un premier téléfilm bien situé dans
la tragique situation actuelle de la petite propriété agricole: Terre brûlée est
dans un rayon de soleil (superbe photo éteinte) et le retour du fils prodigue,
fabulateur raté, précipite le drame. Néanmois Sandrine Dumas a le beau rôle;
lucide mais amoureuse de la vie, elle représente l’espoir. L’incendie final n’est
donc pas là seulement pour pouvoir toucher l’assurance mais possède toute la
charge métaphorique souhaitable!
Surtout, la télévision sait susciter elle-même des premiers longs métrages
sans attendre que le jeune auteur ait fait d’abord ses preuves au cinéma avec
l’appui de l’Avance sur recettes. La même année 1992 par exemple, Jacques
Fansten produit pour Antenne 2 Comme un bateau, la mer en moins de
Dominique Ladoge qui, sans avoir le dynamisme de La Fracture du myocarde
de Fansten lui-même, est une première œuvre très autobiographique déjà fort
maîtrisée construite autour d’un enfant perpétuellement déraciné car vivant en
caravane deux mois ici et trois ailleurs au gré des chantiers dirigés par son père.
Se heurtant à l’ostracisme de ses nouveaux camarades du Nord, il se trouve
alors plus à l’aise en fréquentant de jeunes gitans, qui eux assument avec
arrogance cette mise en marge. L’ensemble est tendu, sans facilité, sur un sujet
original traité avec réalisme mais en restant ouvert à quelques glissements
bienvenus vers l’imaginaire.
À la fin de la décennie 80 s’imposent ainsi de véritables nouveaux auteurs
de télévision qui ne doivent absolument rien aux structures cinématographiques
parce qu’ils trouvent, sur les chaînes françaises, les conditions propres à
l’éclosion de leur créativité et une véritable diffusion en direction d’un vaste
public. Nous avons évoqué Jeanne Labrune et dans le même temps s’impose
80
également François Luciani avec Mémoire d’amour (1989; à la suite d’un
accident, un petit garçon est dans un coma profond. Ses parents divorcés
amorceront une réconciliation pour lui permettre d’en sortir) et Notre Juliette
(1990; là encore «famille» de divorcés: Juliette, 12 ans, passe alternativement
de chez son père solitaire à chez sa mère et son beau-père qui a déjà une jeune
fille de 15 ans), suivis d’un troisième téléfilm totalement différent, Légende
(1992; reconnaissances, suspense et échange de couples chez d’anciens
terroristes irlandais. Déjà un univers s’affirme avec ses paysages dramatiques
(côtes rocheuses sauvages) et sa prégnance d’un passé plus ou moins enfoui,
qui peut même s’imposer à un épisode de la série «L’instit» (Les Chiens et les
loups, 1992) et s’approfondit encore dans Cherche famille désespérément
(1993, L’Enfant des rues (1994) ou Les Feux de la Saint-Jean (1995)). En fait,
Luciani excelle à débusquer les drames qui se cachent sous la description lisse
d’une quotidienneté sans problème. Mais qu’il s’agisse de parents face à leurs
enfants ou d’individus pris dans les mailles d’un groupe ou d’une famille, la
psychologie des personnages préserve toujours ses zones troubles, c’est-à-dire
la complexité du réel.
Certains cinéastes bien oubliés trouvent même à la télévision une nouvelle
jeunesse. Pascal Aubier signe notamment en 1995 Le Fils de Gascogne,
véritable régal pour cinéphiles (nostalgiques de la nouvelle vague comme
fascinés par le show-biz ou simplement amoureux du septième art) qui mélange
allègrement une tournée de chanteurs georgiens avec les souvenirs du cinéma
des années 60, via la mythomanie d’un sympathique et minable parasite qui dit
reconnaître dans le timide accompagnateur de l’agence de voyages pour
ressortissants de l’ex-URSS le fils d’un boute-en-train connu du petit monde de
la nouvelle vague: c’est lui le Gascogne du titre, flambeur et mort depuis près
de trente ans en laissant derrière lui un film invisible... car probablement tourné
sans pellicule!
Mais bien sûr, il y a aussi l’inverse et à ces vrais films du petit écran on
pourrait malheureusement opposer les téléfilms du grand, généralement «en
costumes» et dont la mise en scène souligne pesamment des scénarios déjà
gravement démonstratifs. Les sujets peuvent d’ailleurs être attachants,
variations éternelles sur la comédie humaine où la gravité se donne à voir
(Colonel Chabert, Yves Angelo, 1994), joue à cache-cache (Beaumarchais,
l’insolent, Édouard Molinaro, 1996) ou conserve le masque indétachable de la
légèreté (Ridicule, Patrice Leconte, 1996). Personnages et acteurs pourraient
passer avec aisance d’un film à l’autre, les scènes d’exposition explicatives
étant toujours conventionnelles, les chutes attendues et les réalisateurs
qu’il est aujourd’hui hors de question de budgétiser moins de 5 millions une également François Luciani avec Mémoire d’amour (1989; à la suite d’un dramatique de quatre-vingt-dix minutes. accident, un petit garçon est dans un coma profond. Ses parents divorcés Bref, le contexte est porteur et si la création n’est pas encore revenue au amorceront une réconciliation pour lui permettre d’en sortir) et Notre Juliette tout premier plan comme à l’époque de l’ORTF, le temps du mépris de la (1990; là encore «famille» de divorcés: Juliette, 12 ans, passe alternativement qualité immédiatement consécutif à la privatisation de la première chaîne de chez son père solitaire à chez sa mère et son beau-père qui a déjà une jeune semble désormais passé. Bien sûr, Classe mannequin ou Navarro continuent à fille de 15 ans), suivis d’un troisième téléfilm totalement différent, Légende caracoler aux premières places des sondages et n’ont toujours pas grand-chose à (1992; reconnaissances, suspense et échange de couples chez d’anciens voir avec les œuvres audiovisuelles de quelque intérêt qui forment l’ossature de terroristes irlandais. Déjà un univers s’affirme avec ses paysages dramatiques ce volume. Mais il y a maintenant quelque chose à côté et de plus en plus de (côtes rocheuses sauvages) et sa prégnance d’un passé plus ou moins enfoui, jeunes cinéastes créent indifféremment pour un média ou un autre. Nous avons qui peut même s’imposer à un épisode de la série «L’instit» (Les Chiens et les déjà évoque Philippe Faucon mais aurions pu également suivre la carrière de loups, 1992) et s’approfondit encore dans Cherche famille désespérément Chantal Picault qui, venue du cinéma où elle avait réalisé un premier long (1993, L’Enfant des rues (1994) ou Les Feux de la Saint-Jean (1995)). En fait, métrage sans retenir vraiment l’attention (Accroche-cœur, 1987), poursuit Luciani excelle à débusquer les drames qui se cachent sous la description lisse depuis 1992 son travail à la télévision après un premier téléfilm bien situé dans d’une quotidienneté sans problème. Mais qu’il s’agisse de parents face à leurs la tragique situation actuelle de la petite propriété agricole: Terre brûlée est enfants ou d’individus pris dans les mailles d’un groupe ou d’une famille, la dans un rayon de soleil (superbe photo éteinte) et le retour du fils prodigue, psychologie des personnages préserve toujours ses zones troubles, c’est-à-dire fabulateur raté, précipite le drame. Néanmois Sandrine Dumas a le beau rôle; la complexité du réel. lucide mais amoureuse de la vie, elle représente l’espoir. L’incendie final n’est Certains cinéastes bien oubliés trouvent même à la télévision une nouvelle donc pas là seulement pour pouvoir toucher l’assurance mais possède toute la jeunesse. Pascal Aubier signe notamment en 1995 Le Fils de Gascogne, charge métaphorique souhaitable! véritable régal pour cinéphiles (nostalgiques de la nouvelle vague comme Surtout, la télévision sait susciter elle-même des premiers longs métrages fascinés par le show-biz ou simplement amoureux du septième art) qui mélange sans attendre que le jeune auteur ait fait d’abord ses preuves au cinéma avec allègrement une tournée de chanteurs georgiens avec les souvenirs du cinéma l’appui de l’Avance sur recettes. La même année 1992 par exemple, Jacques des années 60, via la mythomanie d’un sympathique et minable parasite qui dit Fansten produit pour Antenne 2 Comme un bateau, la mer en moins de reconnaître dans le timide accompagnateur de l’agence de voyages pour Dominique Ladoge qui, sans avoir le dynamisme de La Fracture du myocarde ressortissants de l’ex-URSS le fils d’un boute-en-train connu du petit monde de de Fansten lui-même, est une première œuvre très autobiographique déjà fort la nouvelle vague: c’est lui le Gascogne du titre, flambeur et mort depuis près maîtrisée construite autour d’un enfant perpétuellement déraciné car vivant en de trente ans en laissant derrière lui un film invisible... car probablement tourné caravane deux mois ici et trois ailleurs au gré des chantiers dirigés par son père. sans pellicule! Se heurtant à l’ostracisme de ses nouveaux camarades du Nord, il se trouve Mais bien sûr, il y a aussi l’inverse et à ces vrais films du petit écran on alors plus à l’aise en fréquentant de jeunes gitans, qui eux assument avec pourrait malheureusement opposer les téléfilms du grand, généralement «en arrogance cette mise en marge. L’ensemble est tendu, sans facilité, sur un sujet costumes» et dont la mise en scène souligne pesamment des scénarios déjà original traité avec réalisme mais en restant ouvert à quelques glissements gravement démonstratifs. Les sujets peuvent d’ailleurs être attachants, bienvenus vers l’imaginaire. variations éternelles sur la comédie humaine où la gravité se donne à voir À la fin de la décennie 80 s’imposent ainsi de véritables nouveaux auteurs (Colonel Chabert, Yves Angelo, 1994), joue à cache-cache (Beaumarchais, de télévision qui ne doivent absolument rien aux structures cinématographiques l’insolent, Édouard Molinaro, 1996) ou conserve le masque indétachable de la parce qu’ils trouvent, sur les chaînes françaises, les conditions propres à légèreté (Ridicule, Patrice Leconte, 1996). Personnages et acteurs pourraient l’éclosion de leur créativité et une véritable diffusion en direction d’un vaste passer avec aisance d’un film à l’autre, les scènes d’exposition explicatives public. Nous avons évoqué Jeanne Labrune et dans le même temps s’impose étant toujours conventionnelles, les chutes attendues et les réalisateurs 79 80