Культура Франции и России. Мурасова А.Р. - 51 стр.

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Nous regretterons éternellement le nu, qui est le principe même de l'art,
puisque l'homme ne peut concevoir de forme plus parfaite que la sienne,trie а
l'image de Dieu. Le nu, qui était naturel sous le divin climat de la Grèce, dans la
jeunesse de l'humanitė, lorsque la poésie et les arts s'épanouissaient comme les
fleurs d'un printemps intellectuel, a fait Phidias, Lysippe, Clėomene, Agasias,
Agėsandre, Apelle, Zeuxis, Polygnote, comme plus tard il a produit Michel-Ange
et les merveilleux artistes de la Renaissance (sous le nom de nu nous comprenons
la draperie, son complément obligé, comme l'harmonie est le complément de la
mélodie) ; maisjà le nu n'était plus qu'une convention ; l'habit était la visible
forme de l'homme.Statuaires et peintres se plaignent de cet état de choses qu'ils
pourraient, non pas changer, mais modifier а leur avantage. Le costume moderne
les empêche, disent-ils, de faire des chefs-d'oeuvre ; а les entendre, c'est la faute
des habits noirs, des paletots et des crinolines, s'ils ne sont pas des Titien, des van
Dyck, des Velasquez. Cependant ces grands hommes ont peint leurs contemporains
dans des costumes qui laissaient aussi peu paraître le nu que les nôtres, et qui,
parfois élégants, étaient souvent disgracieux ou bizarres. Notre costume est-il
d'ailleurs si laid qu'on le prétend? N'a-t-il pas sa signification, peu comprise
malheureusement des artistes, tout imbus d'ies antiques? Par sa coupe simple et
sa teinte neutre, il donne beaucoup de valeur а la tête, siège de l'intelligence, et aux
mains, outils de la pensée ou signe de la race ; il maintient le corps а son plan et
indique les sacrifices nécessaires а l'effet. Supposez Rembrandt face а face avec un
homme de nos jours, en habit noir ; il concentrera la lumiere prise d'un peu haut
sur le front, éclairera une joue, baignera l'autre d'une ombre chaude, fera pétiller
quelque poils de la moustache et de la barbe, frottera l'habit d'un noir riche et
sourd, plaquera sur le linge une large touche de blanc paillé, piquera deux ou trois
points brillants sur la chaîne de montre, enlevera le tout d'un fond grisâtre, glacé de
bitume. Cela fait, vous trouverez le frac du Parisien aussi beau, aussi
caractéristique que le juste-au-corps ou le pourpoint d'un bourgmestre hollandais.
Si vous préférez le dessin à la couleur, voyez le portrait de M. Bertin par M.
Ingres. Les plis de la redingote et du pantalon ne sont-ils pas fermés, nobles et purs
comme les plis d'une chlamyde ou d'une toge? Le corps ne vit-il pas sous son
vêtement prosaïque comme celui d'une statue sous sa draperie?